Domenech 2008

Domenech est-il le bon sélectionneur pour l'équipe de France ? Peut-être que cette question n'est pas vraiment pertinente. L'échec de l'euro est pourtant bien réel.

Avant l'euro
Si la phase de qualifications en elle-même a été plutôt inintéressante le fait marquant de ces dernières années est la finale en coupe du monde après plusieurs années d'échec et perdue de justesse contre l'Italie. Cette campagne en coupe du monde a été réussie sur plusieurs points: les joueurs d'expérience étaient présents, la préparation physique était exemplaire, pour le reste c'était l'équipe de France avec du talent, un manque de concrétisation, un fond de jeu.
Il ne faut pas oublier que les matchs de poule ont été gagnés de justesse et que le match contre la Corée, ancienne troisième mondiale, positionnée en 3-5-2 (schémas tactique préférentiel de Domenech) a permis de mettre en place tout le dispositif de jeu en 4-5-1. Ce match, nul, a néanmoins permit aussi de mettre en relief les difficultés qui perdureront jusqu'en 2008 (notamment une défense qui préfère descendre que monter).
C'est surtout la prise de fonctione de Domenech qu'il est important de se rappeler, juste après la victoire de la Grèce en coupe d'Europe. Domenech avait alors explicitement défini ses objectifs: mettre en place un système de jeu très fermé, peu ambitieux, jouant en contre à la rigueur, c'est à dire dans une animation plutôt défensive.

Les leçons de 2006
La défense, justement, était le gros chantier après les échecs bien plus graves qu'en 2008 (soyons objectifs, et les résultats, les scores ne suffisent pas à l'annalyse) en 2004 et 2002. Elle a été sécurisée grâce à un dispositif original à 4 défenseurs jouant comme à 3 avec des dédoublements et une dynamique habituellement mise en place en attaque. Une remise en cause de ce dispositif, en plein succès, aurait été compliquée. Et, en gardant Thuram notamment, indiscutable d'ailleurs, une révolution tactique en défense était impossible.

Au milieu de terrain il y avait bien entendu le génie de Zidane mais c'est surtout Viera qui a illuminé la compétition, vrai meilleur joueur du monde cette année-là. Je ne suis pourtant pas fan de ce joueur mais là Domenech avait réussi à exploiter toutes ses qualités en réussissant à positionner Makelele à ses côtés, ou plutôt, et c'est justement là que réside l'astuce, en couverture, et Viera pouvait à loisir jouer son jeu plein de prises de risques, d'impact comme on dit, de profondeur et toujours tourné vers l'avant. Il était donc naturel de garder cette particularité qui n'a été égalée par aucune autre équipe pour l'instant malgré de nombreuses tentatives (Touré, Engelaar... Viera lui-même dans d'autres équipes y compris de France).

L'animation offensive était plus complexeà aborder et à mettre en place. Zidane permettait une phase de transition plus ou moins longue entre la construction et l'offensive proprement dite en gardant le ballon assez haut. En son absence Domenech a tenté une association Benzema-Henry-Ribéry très intéressante dans les matchs de préparation. Mais cette nouvelle animation, guère française, qui coupait l'équipe en deux, ne correspondait ni aux références des joueurs d'expérience ni d'ailleurs des commentateurs ou autres observateurs. En effet ce jeu fait de déséquilibre, de prise d'intervalle avec des joueurs jouant dans un même espace et percutant beaucoup plus vite qu'à l'époque de Zidane ne cadrait pas avec le parti-pris défensif qui était encore de mise.

Les erreurs de Domenech
Plusieurs choses sont reprochées au sélectionneur. La première chose c'est sans doute cette déclaration à la fin du dernier match. Une erreur de communication vraiment ? Sans doute pas au niveau du groupe en lui-même, sans doute pas auniveau médiatique, au niveau personnel en revanche c'est indéniable. Finalement, objectivement, cette déclaration très personnelle a permis de faire table raze très rapidement de la compétition définitivement perdue: il n'était plus question de tenter des explications, il n'y avait plus de raison de rester concentré... c'était presque avant l'heure une proposition de démission (qui par la suite n'a pas été acceptée, avant même tout dépot officiel). Au niveau interne le sélctionneur a permis de détourner les médias des joueurs vers sa personne. C'est une théorie de ma part, elle n'a pas grande valeur. Mais la déclaration n'en avait pas beaucoup non plus et les médias qui l'ont considérée comme intéressante (personne ne leur demandait de la commenter) encore moins.

Au niveau de la sélection la présence de Viera, capitaine, dépositaire du jeu, lien entre les générations, articulation de l'équipe, était en effet discutable. Et force est de constater qu'elle n'a pas beaucoup servit. C'est d'autant plus dommage qu'il aurait pu être remplacé par Flamini qui aurait pu être titulaire.
Soyons clairs si l'échec est collectif l'erreur de casting était Toulalan. J'en ai parlé déjà ici, ce n'était donc pas vraiment une surprise, Toulalan n'est pas capable de créativité tactique. Dans le cadre d'une compétition très novatrice sur cette dimension ce joueur a été complètement en failite malgré une énergie de tous les instants, une technique souvent au rendez-vous et individuellement théoriquement bien placé. Toutes ses qualités ont fait que Toulalan a été considéré par nombre de journalistes comme l'un des joueurs français les plus méritant alors que c'est celui qui a mis en péril toute l'équipe. Malouda s'est retrouvé obligé de prendre la moitié du milieu de terrain, ce qui n'est pas facile pour un joueur pas forcément en forme.
Malouda justement a été très critiqué et n'a d'ailleurs pas été titularisé pour le dernier match, Evra lui étant préféré sans démontrer plus malgré une meilleur forme. Là non plus je ne suis pas fan de Malouda, sorte de Karembeu en moins fou, mais dans le match contre les Pays-Bas c'est lui qui apporte une réaction et de manière très percutante, Makelele ne prenant le jeu à son compte (si on peut dire ça) que contre l'Italie alors que vraiment on aurait préféré voir un autre (Toulalan qui a pris ses responsabilité autant que Trézéguet devant sa télévision).
Enfin dans l'animation offensive Ribéry ne bénéficiait plus de la temporisation/accélération de Zidane et consigne lui était demandée de ne pas perdre le contact avec le reste du milieu de terrain, plombé de son côté par Toulalan. Il n'y avait donc plus vraiment de liant. Benzema et Henry prenaient bien garde de ne prendre aucun interval, jouant donc dans des espaces qui n'existent plus dans aucune défense européenne (sauf à jouer comme la Russie qui a réussi pour une fois, mais exceptionnellement ; et c'est dommage tant ils ont toujours démontré des facultés tactiques hos normes). On aurait pu sélectionner Trézéguet bien sûr mais à jouer de cette manière ça n'aurait rien changer, et soyons honnête malgré toute l'affection que j'ai pour ce joueur, en jouant pour lui on aurait gagné contre des équipes des années 90 pas contre celles de 2008, formidablement ambitieuses.

Au niveau de la préparation on reproche plusieurs choses: la vie de groupe (je pense qu'avec des joueurs du calibre d'une huître comme Nasri qui se croit un cador avec son sourire hypocrite à la Pirès c'est quand même compliqué et cette défaite permettra à certains de retomber sur terre) et la préparation. Les journalistes ont largement critiqué les 3 matchs avant la compétition. Pourtant d'une part il me semble que la préparation physique de 2008 valait celle de 2006, tournée vers la finale, d'autre part je ne comprends pas comment on peu critiquer le choix des adversaires au regard de tous les matchs de la coupe d'Europe et du vainqueur final. Critiquer le choix des équipes d'amérique du sud c'est continuer de croire que la Grèce est championne d'Europe, c'est vouloir refaire les mêmes erreurs que Domenech à sa place.

L'avenir
Le schémas tactique du Leguen de Lyon était encore novateur en 2004, maintenant qu'il est copié par tout le monde ça veut dire qu'il faut regarder ailleurs pour trouver l'innovation. La Roma, Manchester sont par exemple des équipes qui ne jouent plus vraiment avec des attaquants, ou disons que les joueurs en pointe ne sont plus dans l'axe. L'espagne ne joue plus vraiment les espaces depuis 2002, Hiddink généralise le jeu en triangle dans le monde. Je pense que le temps est venu de prendre des risques, de jouer les déséquilibre de tenter de désorganiser des défenses hyper organisées. Le fameux bloc-équipe est devenu une religion et il faut assumer les orientations tactiques.
A court terme Domenech est sans doute le plus apte à cette révolution trop longtemps attendue quand la France rêvait (et rêve encore avec Deschamps, super entraîneur par ailleurs) à la coupe de 98. Il faut donc reconnaître les possibilités des joueurs actuels tout comme leurs limites.


Tentative de sélection


Jouons ce 3-5-2 en capitalisant sur l'impact-couverture du tandem Viera-Makelele, sur l'alimentation 10-9.5-9 de 98 avec Zidane-Djorkaeff-Guivarc'h (animation impossible avec un Cantonna de l'époque par exemple), sur des ailes performantes (à la française: je suis trop jeune pour avoir vu des français jouer sur les ailes comme le font les Pays-Bas), sur une défense enviée et capable d'être puissante, rapide, technique et rigoureuse. Après quelques changements en profondeur un changement de sélectionneur pourra éventuellement avoir un sens et un impact sur les joueurs.

Il faut accepter le fait que ce sont les joueurs qui jouent et que le foot est un sport d'équipe, il ne s'agit pas d'un jeu sur la play-station.

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